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Namur – Martine Canneel – Expo envoûtante au Delta

Publié le 16/07/21, CVdB

Martine Canneel, une femme libre et inventive. Une artiste entre l’éclat solaire et l’intense mélancolie.

Visiter cette expo au Delta est une expérience humaine autant qu’artistique. Pour tout avouer, je ne connaissais pas l’oeuvre de Martine Canneel avant cette immersion avec Isabelle de Longrée, commissaire de l’exposition. Dans le cadre particulièrement intimiste du Delta, la rencontre avec cette artiste belge, tellement singulière, est envoûtante.

On progresse dans les salles au gré des différentes périodes de l’artiste.

En perpétuel manque de lumière, Martine Canneel en recrée l’éclat dans ses sculptures lumineuses. Ses études d’architecte de jardin et urbanisme lui donnent les outils pour imaginer cette expression en 3D. Nous sommes dans les années ’60 et ’70. Matières plastiques, miroirs, néons s’articulent dans des objets surprenants et porteurs de sens. Grands assemblages architecturés dont elle crée elle-même les systèmes électroniques, ou boîtes habitées de petits jouets industriels, son message est bien présent. Message écologique. Elle défend les animaux et la nature en général avec ferveur, humour voire ironie. Comme dans cette boîte aux couleurs joyeuses transformant un boeuf en pièces à découper pour apprenti boucher… Une profonde révolte la tiraille depuis l’enfance.  Elle la partage à sa façon. Un message encore très actuel.

L’artiste révèle ici avec éclat ses deux facettes : expression lumineuse et légère, vision désabusée du monde.

Inspirée par le Bouddhisme

Dans les années ’80, l’artiste intensifie sa pratique du Bouddisme. Ses oeuvres se créent au départ de feuilles de cellulose plastique qu’elle assemble, agglutine, jusqu’à obtenir une matière parcourue de reliefs chatoyants, irrsiés, créant des paysages dont chacun imaginel’existence.

Au 7e ciel, on est intrigué par les lingams, sculptures qui agglomèrent des objets issus de la nature, ramassés par Martine Canneel : noyaux, coquillages écorces… Patiemment, dans un exercice de méditation, l’artiste les assemble. les ponce. Trois mois sont nécessaires pour voir exister une pièce. Tout en rondeur et douceur, les lingams laissent apparaître ces petits bouts de vies.

C’est ici aussi, avec au passage une vue plongeante sur Namur, que l’on découvre la passion de Martine Canneel pour l’Australie, où elle vit avec sa famille à partir de 1982. Elle y travaille sur des projets architecturaux intégrés à la nature, l’océan. Son message écologiste est toujours bien présent, elle crée un habitat en harmonie avec la nature.

Sa maison personnelle en est la démonstration. La grande oeuvre de sa vie. Elle en conçoit le plan sur base d’un mandala, selon les principes du feng shui. Il s’agit d’un foyer unique, écoresponsable, en harmonie avec le cosmos. Chaque partie de maison, située à un point cardinal, est associée à une couleur. La maquette et les photos révèlent à quel point cette réalisation architecturale est pensée dans les moindres détails. Fascinant.

L’oeuvre la plus récente de Martine Canneel trône aussi au 7e ciel. “The last lollies”, créée en 2021 à base de papier, plaquettes de médicaments, aluminium, cellophane et autres matériaux glanés, évoque la mélancolie du temps qui passe : un centre lumineux et enfantin, un cadre qui témoigne du besoin d’aide d’un corps vieillissant. Eclatant, réaliste et pourtant tellement poétique. Audacieux.

Un magnifique catalogue accompagne cette exposition. Mieux, c’est un ouvrage d’art qui permet d’entrer plus encore dans l’univers de Martine Canneel. Claude Lorent nous aide à saisir l’insaisissable artiste et Isabelle de Longrée nous offre six portes pour en appréhender l’oeuvre.

Un avant goût avec le message de Martine Canneel elle-même, en quatrième de couverture.

“Je suis née en 1936, dans une maison remarquable au nom prédestiné de Maison des Trois Couleurs. Cette maison, conçue selon les principes modernistes du Corbusier (que mon père Jean Canneel-Claes admirait au plus haut point), à qui un projet avait initialement été demandé, devait avoir une influence durable sur ma personnalité jusqu’à ce jour (…) J’ai le souvenir d’avoir de tout temps adoré dessiner et observer avec le plus grand respect toutes les formes de vie et de nature (petite fille, sauver les araignées de la noyade dans les toilettes me semblait une évidence); j’aimais passionnément le soleil, la lumière, les couleurs. La musique (ancienne, baroque, jazz) était également essentielle. Cette grande sensibilité fut source à la fois d’une grande vulnérabilité pur ne pas dire de mélancolie et de créativité.”

 

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